TENDUA - Association pour la sauvegarde de la biodiversité

Kaziranga, le refuge du rhino indien

Inde - Assam - Parc de Kaziranga

Le parc national de Kaziranga

Rhinocéros unicorne indien
Sa peau épaisse ressemble à une armure et rappelle quelque ancêtre préhistorique. Son unique corne en kératine peut mesurer entre 20 et 50 cm. C’est par ces attributs que le rhinocéros unicorne indien mâle ou femelle se distingue de ses cousins africains, le rhinocéros blanc (Ceratotherium simum) et le rhinocéros noir (Diceros bicornis) qui, outre leurs gabarits plus imposants, ont eux deux cornes. Il est également un peu plus grand que ces cousins asiatiques : le rhinocéros de Java (Rhinoceros sondaicus)
M. Dupuis

Le parc national de Kaziranga en Assam (Nord-Est de l’Inde) s’impose si l’on souhaite rencontrer le Rhinoceros unicornis indicus ou rhino indien.

Kaziranga occupe un territoire de 430km2. Une décision du gouvernement impérial britannique en 1910 est à l’origine de la création du parc afin de protéger l’espèce dont il ne restait plus que 100 à 200 individus dans toute l’Inde.

Un comptage effectué en 2007 [1] estimait la population actuelle à environ 1900 individus dans le parc, soit 60% de la population totale des rhinocéros unicornes.

Le rhino indien est un peu plus grand que ces cousins asiatiques : le rhinocéros de Java (Rhinoceros sondaicus) dont on dénombrait en 2005 [2] 70 individus à l’état sauvage (Java, Vietnam) - et le rhinocéros de Sumatra (Dicerorhinus sumatrensis) qui a lui aussi 2 cornes et dont la population était estimée en en 2005 [2] à 300 individus dénombrés entre Java, Bornéo et la péninsule malaise.

[1source : estimation de février 2005 de l’International Rhino Foundation

[2source : estimation de février 2005 de l’International Rhino Foundation
M. Dupuis

Cette population s’est reconstituée à partir de la douzaine d’animaux recensés à Kaziranga en 1908, rescapés de la chasse à outrance dont ils furent victimes. Si le succès à long terme de cette opération, qui aura tout de même pris un siècle est évident, il ne faut pas croire pour autant que le rhinocéros unicorne indien est sauver de tout danger d’extinction…(classement UICN : EN), même si, dès 1985, Kaziranga a été inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO.

A quelques heures de voiture de Kaziranga, toujours en Assam, le parc national de Orang (78,82 km2) abrite également quelques dizaines d’individus mais c’est au Népal, dans le parc national de Chitwan que l’on peut voir la seconde grande colonie de quelques centaines de rhinocéros unicornes indiens. Malheureusement, il a désormais disparu du Pakistan et du Bangladesh.


Rhinocéros unicornis
Cet herbivore qui pèse entre 800kg et 2,5 t. est capable de courir sur de courtes distances à 55km/h. Il a une excellente ouïe, un très bon odorat, une mauvaise vue. Il vit entre 30 et 40 ans. Les mâles n’acquièrent leur maturité sexuelle qu’à partir de 9 ans. Les femelles peuvent avoir un petit unique à partir de 4-5 ans pour une mise à bas vers 6-8 ans, la gestation étant de 16 mois
M. Dupuis

Les 3 menaces principales : braconnage, pression anthropique, risque épidémique

Le braconnage

Six cents rangers et gardes forestiers œuvrent à plein temps dans le parc de Kaziranga et se relaient dans les 135 postes de surveillance pour lutter contre le braconnage. En effet, la corne du rhinocéros indien, 100% de kératine, est encore l’objet de convoitise, tant pour la pharmacopée chinoise que pour les poignards moyen-orientaux (une corne se paie jusqu’à 15 000 US$). En 2007, 18 rhinos ont été tués par les braconniers et 3 de plus entre janvier et avril 2008, dont un le 30/04/2008 : une mère assommée par les braconniers, morte de l’hémorragie qui a suivi la découpe de sa corne. Son petit d’un an, resté sans défense, a été la proie d’un tigre.

Mère rhino et son petit
Le petit reste auprès de sa mère jusqu’à 18 mois, parfois plus longtemps, jusqu’à la prochaine mise bas. En moyenne, une femelle donne naissance à un rhinocéron tous les 3 ans. Le rhinocéros unicorne se plait dans les plaines et les marais ouverts, typiques de Kaziranga. C’est à l’aube ou au crépuscule que l’on a le plus de chance de l’observer
M. Dupuis

Le repérage de l’animal est probablement fait par un villageois voisin du parc qui communique par téléphone portable les informations nécessaires aux braconniers. Le villageois sera payé quelques centaines de dollars, le braconnier un peu plus, et l’intermédiaire final sera sans doute celui qui bénéficiera le plus de cette opération. Difficile avec de faibles moyens d’enrailler un système qui perdure depuis si longtemps…

Entrée Ouest du parc
La première maison du village se trouve à 150m de l’entrée Ouest du parc
M. Dupuis

Kaziranga, bien que bénéficiant du statut de parc national, n’a pas aujourd’hui de moyens suffisants pour lutter efficacement contre les braconniers. Malgré un nombre important de rangers, la lutte reste inégale. A titre d’exemple, environ 250 rangers sont concernés par un salaire minimum entre 22 et 30€/mois ; quant aux 400 rangers restants, ils reçoivent entre 90 et 150€/mois. Un ranger ayant une ancienneté de plus de 12 ans gagne 129€/mois et souhaiterait gagner 224€/mois (+ 80%).

La poussée anthropique

Le bureau des Rangers
Le « rangers’office » de l’entrée Sud du parc :
un besoin de moyens modernes
M. Dupuis

L’une des ressources du parc sont les touristes, mais il est vrai que Kaziranga reste encore éloigné des circuits touristiques qui préfèrent le Rajasthan (Ranthambore) ou le Madhya Pradesh (Bandhavgarh, Kanha). Tous ces parcs sont confrontés à la même poussée anthropique : les villages à l’orée des parcs ne cessent de rogner sur le territoire de ces derniers, réduisant ainsi l’habitat naturel des animaux sauvages au profit de l’élevage et de l’agriculture, générant des conflits entre les villageois et les animaux sauvages.

Risque épidémique

Pêcheurs
Les pêcheurs partagent la rivière avec les habitants du parc
M. Dupuis

Un autre problème menace Kaziranga : si 60% de la population totale de rhinos indiens est concentré dans ce parc, qu’adviendrait-il en cas d’épidémie ? Qui plus, n’y a-t-il pas un risque, à terme, de consanguinité ? Bien sûr, les opérations de déplacement d’individus vers d’autres parcs ont bien lieu (par exemple vers Orang), mais c’est alors le risque encore plus élevé de braconnage qui met en péril la vie des animaux…


Jacinthes d’eau
Les jacinthes d’eau ne sont pas une espèce endémique de Kaziranga et prolifèrent sur tous les plans d’eau
M. Dupuis

Des solutions existent

… Encore faut-il en avoir les moyens, ce qui commence par la volonté de faire …

Mieux équiper des rangers avec des technologies plus récentes (radios, jumelles de vision nocturnes, formations adéquates), éduquer les villages voisins en leur expliquant comment le tourisme peut améliorer leur situation et celle de leurs enfants dans la pérennité, créer des corridors entre les parcs afin que les populations d’animaux puissent se déplacer naturellement, comme elles l’ont fait depuis la nuit des temps, assurant ainsi le nécessaire brassage génétique…

Gageons qu’il n’est pas trop tard.

Myriam Dupuis - Mai 2008

[12007 : source : office des rangers du parc national de Kaziranga

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